12. Mercredi. 17. Mardi. 20. Ville de N. Ville de C.
Chant 12. La voix était là qui attendait d’être construite. Est-ce que tu honores la promesse que tu as faite à l’ami mort. oui. j’honore la promesse à la mort. c’est la première chose que je fais lorsque je suis de retour chez C, pour ma dernière nuit avec elle. avant ma dernière nuit avec elle, j’honore la mort en plantant mon sexe dans la terre jusqu’à ce que la mer se retire à l’horizon. Nous restâmes assis devant. Encore un repas avant le départ. Elle s’étendit près de moi et m’interrogea longuement. Je lui contai donc tout dans l’ordre, point par point. Voilà donc une chose faite me dis-je. ensuite je l’écoutai. Elle avait mon avenir inscrit dans son corps. C’était chose étrange. C’était délice de m’abandonner. Elle me parla de ces femmes attirant les hommes et les dévorant, et je la regardais tendrement. Elle me parla de ces femmes au côté desquelles l’on voit s’entasser les os des corps décomposés dont les chairs se réduisent. Et j’aimais l’entendre. Elle me dit que ce plaisir d’entendre il me fallait avec ces femmes-là l’éviter, ou bien que les hommes m’attachent et que de tous je sois le seul à entendre. Qu’aucun d’entre eux n’entende. Ecoute, toi, si tu le veux. Mais qu’ils te lient les pieds et les mains debout sur l’emplanture en t’y attachant avec des cordes. Et tu pourras goûter la joie. Elle dit. Puis me parla de la terrible aboyeuse, et de ses pattes, elle en a douze, difformes, elle a six cous sans fin, aussi, et sur chacune une tête effrayante avec trois rangs de dents nombreuses et serrées, pleine de noire mort. Elle me parla du soleil et de ces animaux ignorant la naissance comme la mort. Si tu n’y touches pas et ne penses qu’à ton retour. Elle ne cessait de répéter. Si tu n’y touches pas et ne penses qu’à ton retour. Je me souviens. De n’avoir échangé avec elle ni au revoir ni adieu. Redoutable à voix de femme était son nom. Et nous reprîmes la mer. Avec tristesse. Je ne répète pas. Nous reprîmes la mer. Et je dis à mes hommes liez-moi par des liens douloureux car je veux entendre ces femmes attirant les hommes et les dévorant je veux moi seul écouter leur voix, liez-moi. Ainsi j’ai su goutté la joie. Je fus le seul. Et tous ils trouvèrent la mort. Moi seul suis de retour. et j’entends les femmes attirant les hommes et les dévorant je les entends me chanter viens, puis repart, alors lourd d’un plus lourd trèsor de science. Terre féconde. Mer stérile. Je brûlais d’écouter. J’écoutais. Je brûlais. Vous vous ne souviendrez, je pense. eh bien non, tous ils mourront. Aucun ne reviendra vivant, pour se souvenir il faut encore être vivant. Aucun ne reviendra. Sinon moi. je suis. Celui qui revient. Je suis. Celui qui sait que les hommes qui m’accompagnent vont mourir. Un à un. Monstre inévitable c’est moi. je suis. Le silence de leur mort connue, annoncée, inconnue et certaine. Je me souviens. De comment ils m’appelaient encore, criant mon nom pour la dernière fois. Avec tristesse. Je répète. Pour la dernière fois. Moi qui sais, mais qui du fait de savoir doit parler. Moi qui dans le sommeil les ai laissés toucher aux animaux intouchables. Ils ont mangé les animaux que l’ont ne touchent. J’étais dans le sommeil. Et la viande meuglait sur les broches, crue ou cuite. On eût dit la voix même des bêtes. C’est alors que le doux sommeil quitta mais yeux. Mais quand. Mais, quand. Mais. Tous ils moururent. Seul. Je suis de retour. Mais pourquoi ce récit. Je vous le fis déjà hier en ces demeures. Et d’ici, je dois partir.
Ils me conduisent au péage de l’autoroute. Père mère c’est leur nom, je n’en connais aucun autre. Ils me conduisent jusqu’au péage. Adieu père mère adieu je reviendrai. Pour un au revoir encore. Une voiture s’arrête. Un homme ouvre la porte. Il y a 24 ans il a traversé l’océan. Pour venir ici. Ici. Arriver. Ici. Des nuits dans le métro. Un compatriote qu’il croise un jour. La même langue. L’entre-aide. Une arrière cuisine, où faire la vaisselle. Des foyers. Faire venir femme et enfants. Construire une maison, mais là-bas, là-bas où la mère est restée vivre. Y retourner tous les ans. Rêver d’y retourner pour toujours, un jour. Mais les enfants ici ont grandi et des enfants sont nés des enfants et la terre natale est ici maintenant, pas la sienne, mais la leur, la terre des amours desquels sont nés des enfants. Nous traversons le pays depuis le centre jusque vers l’ouest. La pluie. La parole puis les silences. Un parking de supermarché, personne, ils sont où les gens qui vivent ici. un arrêt sur le bord de la route. La fatigue. Asperger le visage d’eau. Ne pas mourir. Je ne peux pas mourir car j’ai des enfants. Je ne veux pas mourir car je t’aime. Traverser le pays. construire des maisons. Ecrire des phrases. Le livre, c’est la ville, le village, le lieu où tu vis, au présent du temps de ta vie où tu y vis (vivre). La bibliothèque, c’est le monde. La bibliothèque c’est le temps, le temps de ta vie où tu vis (voir). Le trajet dans la voiture, c’est un trait entre deux récits, c’est un temps de récit entre deux récits. Un temps de récit dans le récit. Nous traversons le pays. il pleut. Il rejoint sa femme. Je ne rejoins personne. Impensable. Ils vivent dans le même pays mais l’un et l’autre à mille kilomètres de distance. Mes amis proches vivent loin. Je me le dis. Je me le dis moins. Je commence à vivre ici. Maintenant. Je comprends les larmes à l’idée de vivre. Ce tremblement. Nous traversons le pays. Il arrête sa voiture sur le périphérique de la ville de N. je descends. J’escalade un pont. Je rejoins un abri bus. J’appelle père mère dormez en paix je suis vivant dans la ville où je vis, dormez en paix, j’en perds le sommeil. Retour à la ville où tu vis. Trajet de là où tu vins à là où tu vis. Voir le monde. Vivre dans.
Elle a perdu ses cheveux. Ne lui en reste plus qu’un qu’elle défile depuis le centre de son front, un fil sans fin qu’elle tire de son crâne. De ses yeux ,ne coulent pas des larmes ; mais du sang ou de la sueur. La main de laquelle elle tire retire le fil dont la pelote pleine est en son crâne, la main est seule est détachée du corps. On ignore si ce crâne et cette main appartiennent au même corps. Les yeux sont clos et pourtant le regard est baissé. Les yeux sont ouverts et fixe un point devant. Un regard. Interdit. Happé par une image. Seule une image saura t’ouvrir les yeux. Les yeux sont clos. Toute attention tourné vers les sons du monde en écho à la pelote de fil en toi : ton esprit , ton âme. Quel mot. les yeux sont ouverts et fixe la pelote qui se forme à l’extérieur et devant les yeux et par la main bien du même crorps que le crâne. Le fil est une ligne dont l’origine se perd en bas à gauche de la carte ou de la page, le fil se roule sur lui-même et dessine des arabesques, des courbes, des chemins infinis qui pourtant finissent, là, sous tes yeux, autour de ce morceau de bois que tu tiens dans ta main, là, la pelote se forme, esprit, âme, hors de toi, bientôt, tu vas te le faire entrer dans le crâne, ce pieu d’âme ou d’esprit. Bientôt, tu viendras t’asseoir face à la fenêtre ouverte et de ta pelote tu déferas le fil et ligne à ligne maintenant tu tisses un rideau bien épais pour cesser de le voir, ce menteur d’amour, attaché à son pieu, femmes de mort en ses pensées tournoyant, tu commences le rideau par le bas : afin d’au plus vite cesser de voir comme il bande car il bande et qu’il bande pour d’autres ou pour toi tu ne sais le voir sans le désirer encore, et c’est dans son crâne que tu voudrais tournoyer et tu y vois y clair, tu n’y es pas, tu tisses le rideau, tu fermes cette fenêtre. Adieu, menteur d’amour. Au dehors, il y a ce rond dans le ciel, ce n’est pas un soleil qui éclaire, ni réchauffe, c’est l’œil d’une machine qui te regarde et garde de toi des images. dehors, le monde, le monde est la parole d’une parole d’une parole. J’écris. des traits me piquent, le crâne est rasé, les cheveux repoussent, des phrases entrent et sortent, un fil me sort du corps par le côté du cœur. Les articulations des bras sont douloureuses. Le feu se tient dans l’esprit ou l’âme. Où se tient l’acide ? j’écris le récit du temps où nous avons formé maison commune et om le soir nous nous retrouvions pour lire le récit d’une invention, celle, de la distance de toi à moi, personnages s’il en est, au grès des jours, où l’écriture se déploie, dans le déroulement de la lecture des récits d’avant, lu aujourd’hui. Il est assez logique j’estime que nos corps ne traversent ^pas cette expérience sans quelques tiraillements. Pour ma part, il m’a fallut hier me découper la partie haute de la boite crânienne, car les arbres dedans ne pouvaient pousser. Je crois avoir trouvé ce matin le moyen de montrer par la parole ce qu’est l’œil de cette machine qui te regarde et garde en elle de toi des images. Je ne suis pas fatigué. Mon corps est énervé comme j’aime. Enervé de vivre enfin. Demain, je ne reviendrai pas. Demain si je suis là. Aujourd’hui. Aujourd’hui.
Tu es amoureux de moi et moi pas de toi. L’on continue de se voir. Combien d’années d’amour non réciproque peuvent ainsi s’écouler. Jusqu’où le non-retour peut-il se donner à vivre. Etre en regarde de toi. Jusqu’où je ne me sers pas de toi. La conscience de la négation de l’autre comment la regardons-nous la vivons-nous l’admettons-nous comme étant en chacun de nous l’un des lieux du pire : en nous. C’est dans un bar, tu es en face de moi, et c’est toi que je trouve belle, j’en tremble : le mensonge est dans ma vie. Essayer. De demander. Arrêter. De demander. Tu t’assois en face de moi. Tu me parles tu chantes tu es seule je t’écoute je rentre chez moi. J’écris. Dans la violence d’une réponse non faite toujours moins violente à la réponse mal faite. J’écris. Dans le tremblement de répondre enfin. Et vraiment.
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